Wednesday, 26 March 2025

La Belgique devrait interdire les activités de commémoration du génocide rwandais sur son territoire.

La possibilité pour la Belgique d'interdire les activités de commémoration du génocide rwandais sur son territoire devrait être envisagée. Plusieurs arguments solides peuvent être avancés en faveur d'une telle interdiction. En effet, ces activités sont souvent utilisées par le gouvernement rwandais actuel pour avancer des accusations controversées envers la Belgique, accusations qui divisent plutôt qu’elles ne réconcilient.

Tout d’abord, le gouvernement rwandais dirigé par Paul Kagame utilise régulièrement les commémorations du génocide pour propager une lecture historique partiale et politiquement instrumentalisée. Selon Kagame, la Belgique serait à l'origine de tous les problèmes du Rwanda, y compris le génocide de 1994. Cette affirmation simpliste ne prend pas en compte la complexité historique et politique du génocide, qui résulte d'une multitude de facteurs internes et externes (Reyntjens, 2013).

Il est crucial de souligner que sans la guerre déclenchée par Paul Kagame et sans l'assassinat du président Juvénal Habyarimana en 1994, le génocide n'aurait jamais eu lieu. Cette responsabilité initiale est souvent ignorée par le discours officiel rwandais actuel, qui préfère attribuer toute la responsabilité à l'ancienne puissance coloniale belge.

François Reyntjens, expert reconnu sur l'histoire du Rwanda, indique clairement que le génocide rwandais a des racines complexes impliquant non seulement l'héritage colonial belge, mais surtout les tensions internes exacerbées par les dirigeants rwandais eux-mêmes, avant et après l'indépendance (Reyntjens, "Political Governance in Post-Genocide Rwanda", 2013).

De plus, le Rwanda accuse ouvertement la Belgique d'avoir cédé des terres rwandaises à la République Démocratique du Congo (RDC) et d’avoir ainsi déclenché une série de conflits frontaliers persistants jusqu’à ce jour. Cette accusation est non seulement historiquement contestable, mais elle omet également les accords internationaux reconnus par les Nations Unies et ratifiés par les États concernés, dont le Rwanda lui-même (Prunier, "Africa's World War", 2009). Gérard Prunier, historien et spécialiste de l’Afrique centrale, souligne que ces frontières ont été largement établies avant même la colonisation belge, et reconnues par les traités internationaux ultérieurs.

Par ailleurs, une autre revendication de Kagame, selon laquelle les terres occupées par des communautés tutsi en RDC seraient historiquement rwandaises et devraient être restituées au Rwanda, pose de graves problèmes de droit international. En réalité, la RDC est habitée par une multitude d'ethnies, ce qui signifie que les zones revendiquées par Kagame n’étaient pas exclusivement habitées par les Tutsi avant la colonisation, mais par diverses communautés ethniques. Les frontières internationales sont protégées par le principe d'intégrité territoriale, reconnu par la Charte des Nations Unies (Stearns, "Dancing in the Glory of Monsters", 2011).

Il est crucial d'observer que de nombreux historiens et analystes indépendants réfutent ces affirmations simplistes de Kagame, soulignant plutôt une manipulation politique évidente du génocide pour consolider un discours nationaliste et expansionniste (Des Forges, "Leave None to Tell the Story", 1999). Alison Des Forges, experte reconnue sur le génocide rwandais, avait déjà alerté sur le risque d'instrumentalisation du génocide par des dirigeants politiques en quête de légitimité internationale et d'influence régionale.

Cette instrumentalisation a évolué aujourd'hui vers une stratégie de chantage diplomatique clair envers la Belgique et la communauté internationale. Kagame utilise régulièrement la culpabilité occidentale face au génocide rwandais pour exiger des soutiens financiers, politiques et diplomatiques indus, tout en étouffant toute critique sur son régime autoritaire (Pottier, "Re-Imagining Rwanda", 2002).

Cette dynamique malsaine est particulièrement visible lors des commémorations nationales et internationales du génocide organisées au Rwanda et en Belgique, où les discours officiels rwandais dérivent systématiquement vers une critique unilatérale et biaisée du rôle historique belge, négligeant les responsabilités des acteurs rwandais eux-mêmes. Cette rhétorique entretient non seulement la désinformation, mais nuit aussi aux relations bilatérales entre la Belgique et les États de la région des Grands Lacs africains.

Compte tenu de ces faits, il serait judicieux pour la Belgique d’interdire les activités de commémoration organisées directement par le gouvernement rwandais ou ses relais officiels sur son territoire. Cette interdiction permettrait de rétablir un cadre plus neutre et objectif pour honorer la mémoire des victimes du génocide, loin des manipulations politiques actuelles.

La Belgique pourrait, à la place, soutenir des initiatives indépendantes et pluralistes de commémoration, favorisant un véritable dialogue historique et la réconciliation entre toutes les parties impliquées. Ce type d'initiatives permettrait non seulement de respecter pleinement la mémoire des victimes, mais aussi de contrer efficacement l'instrumentalisation politique opérée par le régime de Kagame.

En conclusion, la Belgique a tout intérêt à prendre une position claire sur cette question. Interdire les activités de commémoration du génocide organisées par le gouvernement rwandais n’est pas une négation du génocide lui-même, mais plutôt une démarche responsable visant à protéger la vérité historique, à empêcher l’exploitation politique des tragédies humaines, et à promouvoir une réconciliation sincère et durable.

Références:

  • Reyntjens, François. "Political Governance in Post-Genocide Rwanda". Cambridge University Press, 2013.
  • Prunier, Gérard. "Africa’s World War: Congo, the Rwandan Genocide, and the Making of a Continental Catastrophe". Oxford University Press, 2009.
  • Stearns, Jason. "Dancing in the Glory of Monsters: The Collapse of the Congo and the Great War of Africa". PublicAffairs, 2011.
  • Des Forges, Alison. "Leave None to Tell the Story: Genocide in Rwanda". Human Rights Watch, 1999.
  • Pottier, Johan. "Re-Imagining Rwanda: Conflict, Survival and Disinformation in the Late Twentieth Century". Cambridge University Press, 2002.

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By  Rwandan Rights Alliance, London, UK

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